Mid Morning Matters (Sky) – Le meilleur Alan Partridge ?

Mid Morning Matters with Alan Partridge - Steve Coogan
Alan Partridge (Steve Coogan)

Alan Partridge (Steve Coogan) retrouve son premier amour, la radio. Avec sa nouvelle émission de milieu de journée il se considère en pionnier de l’audiovisuel dans cette nouvelle aventure au sein de la radio numérique North Norfolk Digital dont il prononce correctement le slogan une fois sur deux (North Norfolk Best Music Mix). Maître en son royaume Alan décide des débats, les interviews, les invités, créé ses propres jingles et recadre le bouillonnant Sidekick Simon (Tim Key). Mid Morning Matters c’est aussi simple que ça et c’est grandiose.

La mythique création comique fait encore des merveilles à condition de la faire évoluer logiquement. Accompagné d’Armando Iannucci pour les 12 premiers épisodes de 12 minutes publiés sur Youtube, c’est désormais avec Neil et Rob Gibbons que Steve entame une nouvelle ère Partridgienne en 2010. Ils dépeignent un portrait sensiblement différent sans perdre une once de l’essence comique de ce cher présentateur raté. Alan est plus calme, la voix plus posée, il ne s’emporte plus (ou si peu). Tout ce qui caractérise Alan, de ses ressorts comiques à sa complexité sont toujours usés avec brio. Comme l’illustre un des meilleurs gags de toute sa carrière, son auto-interview en saison 1. Dans un glorieux exercice d’autopromotion foireux Alan insère une cassette contenant les questions et les rebondissements aux réponses données en direct par Alan. Du grand art qui commence dès le lancement avec un sublime générique chanté (4ème vidéo), toujours, par Alan : « It’s me, on me, on Alan, on Alan, on I, on I, on Partridge, on Partridge. » A la 3ème répétition Simon s’interroge si ça tourne en boucle. Non et pour preuve à la 5ème il s’étrangle. Pas gêné une seule seconde, Alan bat la mesure pour indiquer l’endroit exact. Comme si après des décennies d’expérience cette erreur lui semble tout à fait acceptable et surtout il ne lui viendrait jamais à l’esprit de recommencer l’enregistrement.

Toute l’essence et la beauté d’Alan Partridge sont intactes. Il parait être plus conscient de lui-même, de ses fautes mais son entêtement l’empêche de devenir l’animateur accompli qu’il pense être. Le leitmotiv de la carrière de Steve est sauf. Comme tout être humain les échecs et l’âge l’ont changé suffisamment pour donner 2 nouvelles et brillantes saisons sans trahir le personnage. Mid Morning Matters est le règne de l’insignifiance. Les débats n’ont aucun intérêt (Quelle voiture conduirait un personnage historique s’il était encore en vie ? A quelle fréquence lavez-vous vos  serviettes ?). Selon la légende c’est après une hilarante rencontre dans un pub qu’Alan décide d’introduire à l’antenne Sidekick Simon chargé d’apporter son humour et sa répartie cinglante au fil de l’émission. Je vous laisse juger des goûts humoristiques d’Alan. Avec un sens de la gaffe innée il plombe chacune de ses vannes, enchaîne les bourdes et les grimaces qui vont avec. Uniquement filmé dans les studios de la radio (celui d’Alan et le bureau adjacent) les webcams offrent aux spectateurs ses coups d’oeil complices à la caméra, sa tentative de loger une clémentine entière dans sa bouche ou le voir profiter d’un disque pour s’amuser dans la peau d’un flic tiré d’un film des années 70 (5ème vidéo).

Alan fait preuve de curiosité. Il essaye vraiment mais son naturel et son sens de la formulation fâcheuse lui valent toujours de grands moments de solitude. Il ne bosse pas ses rubriques et invente des concepts toujours plus cons comme la bataille navale avec une radio russe qu’il appelle en direct pour un mouvement. Il se révèle étonnamment nerveux et bégaye à plusieurs reprises. Il confond son intérêt personnel avec celui des auditeurs au risque de traumatiser les enfants qui l’écoutent. Mid Morning Matters est-elle la meilleure série d’Alan Partridge ? Elle ne dépassera jamais I’m Alan Partridge pour une seule raison, le caracteur novateur et fondateur de cette dernière. En revanche elle peut bien rivaliser avec son prédécesseur sur le plan comique. Elle affiche également une parfaite continuité avec Knowing Me, Knowing You et I’m AP (à voir si vous voulez pleinement profiter de cette dernière série). En se concentrant uniquement sur son travail la série explore l’essence même du Partridigisme obligeant les auteurs à rivaliser en ingéniosité dans les dialogues. Les gags sont développés avec intelligence sur un terme long, jamais hors de propos, jamais trop ou pas assez. Les habitués apprécieront le retour hilarant de Dave Clifton après son combat contre l’alcoolisme. Et comme souvent après un rythme effréné de répliques cultes la série se termine sur une note douce-amère pour Alan, qui n’a pas fini de pleurer…

Mid Morning Matter est aussi la meilleure interprétation de Steve Coogan 25 ans après la création de son alter égo négatif. Forcément plus mature, Alan requiert une subtilité qui ne doit pas éclipser son excentricité. J’ai toujours été bluffée par le comédien mais il signe sûrement une des ces meilleures performances en combinant merveilleusement un nouveau souffle de sensibilité à un personnage grotesque. Il offre aussi une place de choix à Tim Key qui campe un soutien inattendu car s’il semble avoir du recul il se révèle étonnement proche d’Alan. Et au lieu d’être écrasées sa douceur et ses précautions prennent toute leur place devant la caméra et ce malgré une série exclusivement centrée sur Alan. Leurs prestations retranscrivent parfaitement cette sorte d’alchimie étrange qui les empêche d’être en symbiose. Inutile de vous dire que cette série aligne encore un casting de rêve avec en invités Darren Boyd, Julian Barratt et enfin la rencontre entre Steve et Reece Shearsmith en auteur autoproclamé victime du politiquement correct.

Mid Morning Matters c’est du très grand Alan Partridge, un Steve Coogan qui côtoie la perfection et un personnage grandiose si sûr de lui et en même temps si fragile. On se moque de lui, on tente de le remplacer mais Alan s’en fout c’est toujours lui qui a le dernier rire (oui jusqu’au bout).

Créé et écrit par Steve Coogan, Armando Iannucci, Rob et Neil Gibbons. Réalisé par Ted Dowd. 2 saisons, 12 épisodes de 30 minutes. 2010 et 2016.

 

Retrouvez sur mon blog un portrait/hommage à Steve Coogan – L’observateur obsessionnel https://dismoimedia.com/2016/10/20/portrait-de-steve-coogan-lobservateur-obsessionnel/


2 réflexions sur “Mid Morning Matters (Sky) – Le meilleur Alan Partridge ?

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