Lena Dunham met Girls à l’heure des choix et des responsabilités. Hannah Horvath (Lena Dunham) en premier lieu, censée vivre un tournant merveilleux dans sa vie professionnelle va encaisser les révélations sur son père et subir un amour vacillant. Shoshanna (Zosiat Mamet) s’engage avec énergie et optimisme sur le marché du travail. Marnie (Allison Williams) plus paumée que jamais continue sa carrière naissante avec son duo pop avec Desi (Ebon Moss Bachrach). Jessa (Jemima Kirke) est au fond du trou, et malheureusement pour les autres, amoureuse. Chez les hommes Ray (Alex Karpovski) se découvre une fibre militante, Adam (Adam Driver) étouffe, Desi se révèle être un pauvre mec et Elijah (Andrew Rannells) un ami fidèle et sincère.
Loin de choyer ses personnages Lena Dunham entame une nouvelle ère faite de révélation et d’échec. Les vies évoluent, les choix compliqués s’immiscent partout, à un moment crucial où chacune a besoin de savoir ce qu’il quitte et trouve. Les groupes se font et se défont. Les couples en particulier souffriront. Une épreuve particulièrement éprouvante pour Hannah. Désireuse d’être le centre d’intérêt de ses amis, toujours aussi égocentrés.
Au coeur de cette saison l’égoisme, celui d’Hannah principalement. Incapable d’ouvrir les yeux sur la souffrance de ses amies. Incapable aussi de comprendre ce qui l’attend et de l’empêcher. Girls est moins la mise en scène chorale d’un groupe foutraque que l’aréopage d’une fille capricieuse. Les fulgurances, les vérités crachées à la gueule (de Jessa mouhahaha !) et les séquences drôles ne parviendront pas à cacher le sujet principal « Lena et moi et moi et moi ».

Si ce traitement m’avait agacé les saisons précédentes, il est apporté avec suffisamment d’intelligence et de recul pour me surprendre. Lena aborde son double avec en tête les nombreux reproches quand à son écriture et ses fréquentes mises en avant. Certains y on vu des piques envers ses détracteurs, pour ma part j’y vois plutôt un surprenant travail d’autodérision. Hannah est vivement critiquée pour ses écrits trop personnels et sa susceptibilité. Loin de tourner en ridicule ses critiques, son portrait dressé ici confirme un personnage imbu de lui-même et méprisant. Elle répond donc à ses critiques par un double meurtri ni pathétique ni triomphant. Un exercice rare et maîtrisé qui ne peut malheureusement remplacer l’usage récurrent des personnages exubérants.
Nouvelle venue Mimi rose (Gillian Jacobs) est à l’image de Jessa, un persoage gonflé, excentrique au possible abordant des décisions délicates avec décontraction. Je ne nie pas l’existence de personnage pareil s’ils n’étaient pas tous aussi extrêmes. Girls est comme une foire aux monstres contemporaine où les créature abordent l’exceptionnel avec le masque de la normalité. Nous vivons certes une époque où les femmes assument de mieux en mieux leur liberté. Cependant elles vont rarement aussi loin et sans peine vers des actes encore vu comme douloureux. Tous vivent intensément leurs envies et leurs déboires. Les cris viennent du coeur, les muscles se tendent et les sanglots affleurent. Leurs réactions sont compréhensibles, je ne le nie pas, mais il faudrait équilibrer. Heureusement ces nouveaux arrivants sont l’occasion d’une critique féroce de l’art contemporain, contrairement aux premières saisons où il apparaissait en filigranes. Cette Mimi-rose, artiste et auteure d’un happening se confronte à une Hannah fatiguée de ces fausses démonstrations. Le compagnon de route Ace (Zachary Quinto), affublé d’une brosse à dent (???) est tout aussi cynique bien qu’impliqué dans ce domaine. Beaucoup sont agaçants mais la saison les met peu à peu face à leur débordements et leur vacuité.
Malgré ces bons points et une excursion dans l’Iowa, réussie et drôle, où Hannah découvre un lieu reposant et sécurisé, une chose ne cesse de m’intriguer. J’ai toujours cette impression de trop peu. Pourtant j’apprécie ce format court mais il manque un je-ne-sais-quoi. Lena Dunham écrit et surtout confronte son pulic à sa réalité, or dans ce contexte on s’attend toujours à plus, à la dénonciation inévitable et qui ici ne vient jamais. C’est sûrement mieux comme ça, je ne l’imagine pas en gardienne de la moralité et des comportements appropriés. En revanche j’ai comme l’impression que les personnages, malgré un nouvelle richesse ne vivent que pour eux-mêmes. Girls manque d’un liant, là où le groupe ne semble exister que par la volonté de la créatrice.


WordPress:
J’aime chargement…
Articles similaires
Personnellement, j'ai bien aimé cette dernière saison de Girls mais effectivement, bien que je trouve finalement les personnages attachants (sinon j'aurais vraiment abandonné cette série depuis des lustres), cette série continue d'avoir des défauts même si Dunham commence à prendre un peu de recul. Mais il est dommage de voir Dunham passer à côté de certaines situations (comme le trop court passage à sa nouvelle fac) ou de voir des personnages trop dans des extrêmes. Mais ça reste vraiment sympathique, ça a le mérite d'être court et divertissant !
J’aimeJ’aime
Au regard de sa popularité il semble y avoir un énorme décalage comparé à sa qualité. Honnêtement en tant que showrunneuse je trouve Lena moyenne. La série est effectivement sympathique et divertissante, pose pas mal de question mais ne résout pas grand chose. Sa réputation aura été plus forte que son contenu. Comme tu dis le passage à la fac est assez court bien que très drôle et bien amené ne serait-ce que par le décalage entre la petite ville et la new-yorkaise. Ca manque un peu de finesse.
J’aimeJ’aime
Le problème de cette série, c'est qu'on fait du surplace. On pense avancer mais à chaque fois, bing ! Du coup, je me demande vraiment où Lena (allez on est intime, on l'appelle par son petit prénom) veut en venir, où elle amène sa série. Le truc assez paradoxal c'est que quelque part on arrive à s'identifier aux personnages (je veux dire, quand on rassemble les personnages ensemble, on arrive à voir des gens qu'on connait, surtout de notre âge) mais c'est vrai qu'elle a une vision extrême de notre jeunesse, elle ne cible qu'une certaine partie de la population des jeunes.
J’aimeJ’aime
Allez soyons folles ! Pendant la rédaction j'ai hésité à qualifier Lena de bonne observatrice et mauvaise showrunneuse. Ses qualités portent principalement sur sa capacité à restituer les défauts de notre époque. En revanche si on aborde les qualités propres à une série ça coince notamment sur les relations entre persos.
J’aimeJ’aime
Tiens, pas mal comme remarque sur Dunham, c'est assez pertinent !
J’aimeJ’aime